Bagne Iles du salut Vincent Sationnel

Le bagne

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René BENOIT “Parolier”

Sur ces rivages inconnus

Loin, très loin des vieilles villes

Un sentiment d’homme perdu

Très fort m’étreint au cœur des îles

Elles sont là entre ciel et flots

Posées et oubliées du créateur

Immobiles, malgré l’assaut

Du flux et du reflux vengeur

Elles se nomment du Salut

Mais pourquoi donc telle ironie

Puisque l’enfer des hommes ce fut

Jetés ici jusqu’à l’oubli

Combien de fois le tour, j’ai vu

Est-ce bien les îles du Salut

Ou bien celles des pas perdus

Où tant d’hommes vécurent reclus ?

J’écoute le souffle de la mer,

Et il me semble reconnaître

Des hommes enlevés à la Terre

Le cri avant de disparaître

Car en partant dans l’au-delà

Leurs frères, leurs pairs ils ont maudit

Le poing fermé levant le bras

De tout mon être, j’en frémis

Mon cœur par delà l’océan

Vole vers tous les chers parents

Qui eux aussi comptent les ans

Les séparant des pauvres enfants

Hélas, trop peu sont revenus

Pas même un signe ou même un mot

De ces fils trop tôt disparus

Un instant bercé par le flot

De ces êtres, les âmes

Hantent maintenant les îles

Et chaque soir sur la vague

Elles agitent des faucilles

Leur souffle est un murmure

Leurs mots sont chargés de haine,

Et dans le soir, s’élèvent lugubres,

Assourdissant encore ma peine

Chaque jour, à pareille heure

Sur les îles s’arrête la vie

Quand la nuit étend son linceul

Alors que les vivants s’enfuient

Chacun apporte son obole

L’hibiscus se referme sans bruit

L’oiseau mouche suspend son vol

Et l’alizé jusqu’à l’infini

Emporte les cris de douleur

Aux pieds des hommes, ils les déposent

Pour qu’ils bannissent de leur cœur

L’injustice qui leur sert de cause

Alors, un souffle nouveau

Reviendra réveiller les îles

Et les âmes sur les flots

Repartiront vers les vieilles villes

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